Peut-on attraper des coups de soleil sur les yeux ?

Le Dr Alexandre Majoulet en compagnie de deux collègues devant l'hôpital de 15-20. Les 3 personnes portent des lunettes de soleil pour se protéger des rayons ultraviolets, qui peuvent entrainer une photokératite.

Si l’accent est généralement sur la protection de la peau face au soleil, d’autres parties du corps peuvent subir les dommages des rayons UV. Tout aussi douloureux, les coups de soleil sur les yeux (et non pas sur la paupière) peuvent faire des dégâts. Explications de ce phénomène avec le Dr Alexandre Majoulet, chirurgien-ophtalmologue spécialiste de la rétine. 

Qu’est-ce que la photokératite ?

La kératite désigne une “érosion de la cornée”, rappelle le Manuel MSD. Alors, si on l’appelle “coup de soleil des yeux”, c’est parce que “la photokératite est une inflammation de la cornée liée à la lumière, et plus spécifiquement aux rayons UVA et UVB”, le Dr Alexandre Majoulet. En d’autres termes, les rayons ultraviolets viennent attaquer l’oeil et “entraînent une mort cellulaire au niveau de la cornée, créant ainsi des lésions à la surface de celui-ci”, poursuit-il. Mais elle peut aussi se répandre à la paupière, la rétine et au cristallin.

Elle survient lors d’une exposition au soleil, mais l’expert précise qu’il ne faut pas croire qu’elle s’attrape uniquement au zénith, c’est-à-dire, lorsque l’astre est le plus haut dans le ciel, “moment pendant lequel nos cils et nos sourcils nous protègent”. Le risque est en réalité plus important “en fin de matinée et/ou en fin d’après-midi, car l’axe des rayons pénètre directement dans nos yeux”. D’ailleurs, elle est susceptible d’apparaître aussi bien à la plage que sur les pistes de ski, car le soleil “réfléchit environ à 80% sur une neige fraîche et à 20% sur le sable et l’eau”, complète-t-il. Dans ce cas, on parle aussi d’ “ophtalmie des neiges”.

Yeux rouges, sensation de brûlure, baisse de la vision : les symptômes évocateurs

Les symptômes du coup de soleil dans les yeux ne sont pas immédiats et apparaissent quelques heures après l’exposition au soleil. Parmi eux, l’ophtalmologue liste “une douleur, une rougeur oculaire, une photophobie (sensibilité à la lumière, ndlr) et une baisse de l’acuité visuelle bilatérale ou asymétrique”. Elle peut également provoquer des larmoiements, un gonflement des paupières et une démangeaison du fait de l’irritation, avec une sensation d’avoir un corps étranger dans l’oeil, ou encore des maux de tête, selon le Manuel MSD.

Que faire si j’ai un coup de soleil sur les yeux ?

La bonne nouvelle est que cette lésion oculaire guérit, en général sans séquelle, en deux à trois jours, “car l’épithélium cornéen se régénère en 48h”, rassure-t-il. Mais une fois que les signes apparaissent, quelques gestes peuvent aider. D’abord, vous pouvez appliquer des compresses froides sur vos yeux pour apaiser la douleur, bien qu’elles ne constituent pas un traitement. Il vaut mieux penser à reposer ses yeux des écrans, de la lumière, y compris après la guérison.

Enfin, l’ophtalmologue rappelle que le sérum physiologique ne soulagera pas la lésion, au contraire, “il irrite plus qu’autre chose”. Toutefois, pour s’assurer que vos maux sont bien à l’origine d’une photokératite, mieux vaut consulter un médecin ophtalmologue, afin de réaliser un examen “à l’aide d’une lampe à fente pour analyser l’oeil et confirmer le diagnostic”. En termes de traitement, le médecin pourra prescrire des larmes artificielles, des gouttes anti-inflammatoire voire de l’atropine, “qui dilate la pupille et a un effet antalgique”, indique-t-il.

Quelles en sont les conséquences à long terme ?

Si elle n’est pas considérée comme une affection sévère, il ne faut cependant pas négliger son atteinte, qui pourrait avoir de réelles conséquences à long terme. En effet, une lésion chronique représente un réel risque susceptible “d’accélérer l’apparition d’une cataracte et d’une maculopathie liée à l’âge, indiquant un vieillissement de la rétine”, alerte le médecin.

Mais elle présente aussi un risque de conjonctivite, une inflammation de la membrane qui recouvre la partie blanche de l’oeil et l’intérieur des paupières, ainsi que de ptérygion, un épaississement de tissu qui se développe à partir de la conjonctive et apparaît au coin interne de l’oeil et progresse jusqu’à envahir la cornée, développe le site du CHU de Genève. “Ce sont des affections bénignes, mais qui peuvent nécessiter une chirurgie”, ajoute l’expert.

Les rayons ultraviolets peuvent aussi déclencher d’autres pathologies oculaires comme les uvéites, une inflammation des tissus intra-oculaires, situés dans les couches profondes du globe : l’iris, la choroïde, la rétine et ses vaisseaux, décrit le cabinet d’ophtalmologie des Flandres ; la kératite herpétique soit une infection de la cornée par le virus herpes simplex ou encore une rétinopathie solaire, “qui correspond à une détérioration des cônes de la rétine et donne l’impression d’avoir des taches au centre de la vision”.

Enfin, à répétition, elle peut favoriser l’apparition d’un cancer cutané au niveau des paupières ou même un mélanome choroïdien, pourtant très rare “puisque seulement 500 à 600 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année en France”, rapporte le Syndicat national des ophtalmologistes de France.

Comment s’en prémunir ?

Pour se protéger du soleil, les conseils habituels peuvent s’appliquer afin de se prémunir de toute affection, à commencer par “porter un chapeau et des lunettes de soleil catégorie 3 minimum, appliquer de la crème solaire régulièrement et se mettre à l’ombre”, conseille le professionnel de santé. Si cela semble évident, il s’agit néanmoins de rappeler les dangers de regarder le soleil ou une éclipse directement, car “cela peut entraîner des lésions irrécupérables”, alerte-t-il.

Une attention toute particulière doit être portée aux enfants, “dont le cristallin est encore très clair”, ce pourquoi des lunettes de soleil d’une catégorie supérieure peut être nécessaire, mais aussi aux yeux clairs et/ou sensibles, “dont l’iris est moins foncé et donc plus irritable”, conclut-il.

Article écrit par Ariane De Wilde pour Marie Claire, publié le 30 juin 2024

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